On ouvre la caisse, on pose les nouvelles arrivantes dans le poulailler, et la question tombe aussitôt : faut-il vermifuger les poules dès leur arrivée ? On a envie de bien faire, d'éviter les galères. Je comprends. J'élève des poules depuis plus de quinze ans, et si j'ai appris une chose, c'est que la précipitation n'est pas l'amie de la basse-cour. Observons, agissons quand il faut, pas au petit bonheur.
Observation d'abord : poser les bases les dix premiers jours
Quand de nouvelles poules arrivent, je commence par un sas calme. Pas de grands remue-ménages, juste du propre, de l'eau claire, une alimentation simple, et un coin séparé si vous avez déjà un groupe installé.
- Quarantaine de 10 à 15 jours dans un enclos séparé, à l'abri des courants d'air et des prédateurs.
- Fientes observées sur du papier absorbant, c'est bête comme bonjour mais redoutable pour voir ce qui cloche.
- Pesée de départ (une caisse, une balance), puis re-pesée à J+7 : une perte nette est un signal.
- Regarder l'oeil, la crête, le souffle, la tenue des plumes. Une poule "rangée" est souvent une poule qui va bien.
Cette petite routine calme les choses et vous dit l'essentiel avant de dégainer un produit.
Vermifuger systématiquement ? Le vrai dilemme
Traiter d'emblée a un avantage évident : si l'oiseau est chargé en parasites internes, on frappe vite. Mais il y a des revers : créer des résistances, stresser un organisme déjà chahuté par le transport, masquer un autre problème (nutrition, coccidies, stress) en pensant tout régler avec une seringue.
- Les "plus" : on agit vite si l'infestation est réelle, on protège le troupeau existant.
- Les "moins" : risque de traiter pour rien, fatigue du foie, sentiment de fausse sécurité.
Mon cap, au fil des années, est devenu simple : pas de vermifuge automatique. J'observe, je teste si possible, je traite si les signes sont là.
Les signes qui doivent vous alerter
Les vers ne se voient pas toujours, mais le corps parle. S'il envoie plusieurs de ces signaux, il est temps d'agir.
- Perte de poids malgré un appétit normal ou vorace.
- Plumage terne, queue tombante, poule qui "se tasse".
- Baisse de ponte, coquilles fines, oeufs plus petits.
- Fientes liquide ou visqueuses, parfois avec des filaments.
- Fatigue au perchoir, respiration plus courte à l'effort.
Deux ou trois de ces signes, surtout ensemble, justifient un traitement, sans attendre.
Tester les fientes : la voie simple et fiable
Quand je peux, je fais analyser les fientes. Rien de sorcier : on collecte sur deux jours, on met dans un petit pot bien fermé, et on passe par un vétérinaire ou un labo qui accepte les échantillons particuliers. Le résultat vous dit s'il y a des parasites internes et à quel niveau.
Si c'est positif ou si les signes sont marqués, on traite tout le petit groupe. Si c'est négatif et que les poules vont bien, on garde la main légère et on poursuit l'observation.
Quarantaine et traitement : comment s'y prendre concrètement
Si vous décidez de vermifuger, choisissez un vermifuge vétérinaire adapté aux poules et suivez la notice. Traitez toutes les nouvelles et respectez le délai d'attente pour les oeufs indiqué par le produit. Le jour J, je nettoie dur, pour casser le cycle des parasites.
- Retirer entièrement la litière, brosser les perchoirs, racler les fientes sèches.
- Laver à l'eau chaude et au savon noir, rincer, laisser sécher.
- Remettre une litière propre et sèche, aérer, éviter l'humidité.
Ce ménage de fond, couplé au traitement, fait la vraie différence. Sans propreté, les vers reviennent.
Remèdes de grand-mère : utiles, mais pas des vermifuges
L'ail dans l'eau, un trait de vinaigre de cidre, quelques plantes amères... j'en utilise. Ça soutient l'appétit, l'immunité, l'équilibre du jabot. Mais soyons clairs : ce ne sont pas des vermifuges. La terre de diatomée, par exemple, est utile contre certains parasites externes dans la litière, mais en interne, elle ne remplace pas un vrai traitement. Gardons-les comme compléments, pas comme bouclier.
Témoignages du terrain
"La première année, j'ai vermifugé d'office. Ça m'a rassurée, mais j'ai appris ensuite à regarder mes poules. Aujourd'hui je teste d'abord, je traite quand il faut, et ça se passe mieux." - Lucie, jardin partagé à Nantes
"J'ai vu des poules s'épuiser à cause de vers, c'est réel. Mais j'ai aussi vu des gens traiter tous les deux mois 'au cas où'. Depuis que je nettoie mieux le poulailler et que je fais analyser les fientes, je traite moins et plus juste." - Marc, petit élevage familial
Conclusion : mon conseil simple
A l'arrivée, pas de réflexe automatique. Offrez une quarantaine propre, observez, pesez, regardez les fientes. Si vous pouvez, faites analyser. Traitez vite et bien en cas de signes ou de test positif, en nettoyant le poulailler le même jour et en respectant le délai pour les oeufs. Le reste du temps, de la patience, une litière sèche, une alimentation nette, et vous verrez : les poules vous diront beaucoup, si vous prenez le temps de les regarder.